Steroïdes et AINS : Risque accru de saignements gastro-intestinaux et prévention efficace

Steroïdes et AINS : Risque accru de saignements gastro-intestinaux et prévention efficace

Outil d'évaluation de la prophylaxie PPI pour stéroïdes et AINS

Évaluez votre risque de saignement gastro-intestinal

Cette interaction médicamenteuse augmente le risque de saignement jusqu'à 12 fois. Découvrez la dose de PPI recommandée pour vous protéger.

Information importante :

La prophylaxie par PPI coûte moins de 2 euros par mois en générique. C'est un investissement minuscule pour éviter une catastrophe médicale.

La plupart des médecins oublient de prescrire cette prophylaxie, mais elle est obligatoire selon les recommandations médicales.

Prendre des stéroïdes et des AINS en même temps peut sembler inoffensif - surtout si vous avez mal aux articulations, une inflammation ou une maladie chronique. Mais ce mélange, souvent prescrit sans précaution, augmente le risque de saignement gastro-intestinal jusqu’à 12 fois. Et la plupart des patients ne le savent pas.

Comment ce mélange devient dangereux

Les AINS, comme l’ibuprofène ou le naproxène, agissent en bloquant une enzyme appelée COX-1. Cette enzyme produit des prostaglandines, des molécules qui protègent la muqueuse de l’estomac en stimulant la production de mucus et en maintenant un bon flux sanguin. Sans elles, l’estomac devient vulnérable. Les stéroïdes, comme la prednisone, compliquent encore plus les choses : ils ralentissent la cicatrisation des lésions, réduisent la production de mucus, et surtout, masquent les symptômes. Un ulcère qui saigne ? Pas de douleur intense. Pas de brûlures. Juste une fatigue soudaine, des selles noires, ou pire, un effondrement soudain à l’hôpital.

Une étude publiée dans l’American Journal of Epidemiology en 2001 a montré que prendre des stéroïdes systémiques seul augmente déjà le risque de saignement gastro-intestinal de 80 %. Mais quand vous ajoutez un AINS, le risque explose : il passe à un odds ratio de 8,9. Pour les patients prenant des doses élevées d’AINS (ex. : ibuprofène ≥1200 mg/jour), ce risque grimpe à 12,7. C’est plus que le double du risque lié à un seul médicament.

Les AINS ne sont pas tous égaux

Tous les AINS ne posent pas le même niveau de risque. Les AINS traditionnels - naproxène, diclofénac, ibuprofène - sont les plus agressifs pour l’estomac. Les inhibiteurs sélectifs du COX-2, comme le célécoxib, sont beaucoup plus doux : ils réduisent le risque de saignement de 50 à 60 % par rapport aux AINS classiques. Une étude appelée CONCERN a montré que chez les patients prenant aussi de l’aspirine, le célécoxib associé à un PPI réduisait les saignements récurrents de 54 % par rapport au naproxène avec PPI.

Mais attention : même les COX-2 ne sont pas sans risque quand ils sont combinés avec des stéroïdes. Le risque est moindre, mais il existe toujours. Et surtout, la dose compte. Un ibuprofène à 400 mg par jour est beaucoup moins dangereux qu’à 1200 mg. Un diclofénac à 50 mg par jour est moins agressif qu’à 150 mg. Pourtant, beaucoup de patients prennent des doses élevées sans savoir.

La prophylaxie : ce que les médecins oublient souvent

La bonne nouvelle ? Ce risque est largement évitable. La mauvaise ? Seulement 39 % des patients sous stéroïdes et AINS reçoivent la prophylaxie recommandée. Dans les services non spécialisés en rhumatologie, ce taux tombe à 22 %. Pourquoi ? Parce que beaucoup de médecins pensent que « ce n’est qu’un petit traitement » ou que « le patient n’a pas d’antécédents ».

Les directives de l’American College of Gastroenterology et de l’American Gastroenterological Association sont claires : tout patient prenant simultanément un stéroïde et un AINS doit recevoir un inhibiteur de la pompe à protons (PPI). Ce n’est pas une option. C’est une norme. Les PPI comme l’oméprazole, l’ésoméprazole ou le pantoprazole réduisent le risque d’ulcère de 73 % par rapport à aucun traitement. Les H2RAs (comme la ranitidine) sont moins efficaces - ils réduisent le risque de seulement 48 %.

La dose recommandée ? 20 mg d’oméprazole par jour pour les patients à risque modéré. Pour les patients à haut risque - plus de 65 ans, antécédents d’ulcère, traitement par anticoagulants - on passe à 40 mg par jour. Et il faut le prescrire pour toute la durée du traitement, pas seulement les premiers jours. Un saignement peut survenir à tout moment, même après 2 semaines.

Un médecin remet une pilule PPI à un patient, avec une vision contrastée de l'estomac sain et ulcéré en arrière-plan.

Les patients à risque élevé - ce qu’il faut savoir

Certains groupes sont particulièrement vulnérables :

  • Les personnes âgées de plus de 65 ans
  • Celles ayant déjà eu un ulcère ou un saignement gastro-intestinal
  • Celles qui prennent un anticoagulant (warfarine, apixaban, rivaroxaban)
  • Celles qui prennent plusieurs AINS en même temps
  • Celles qui reçoivent des « coups de pouce » de stéroïdes - même une courte cure de 5 à 7 jours

Une étude de 2022 a montré que 78 % des décès liés aux saignements d’AINS concernaient des patients ayant déjà eu un ulcère. Et pourtant, beaucoup de ces patients n’ont pas reçu de PPI. Un seul saignement peut être fatal. Et il est souvent évitable.

Les erreurs courantes qui tuent

Voici les 4 erreurs les plus fréquentes dans la pratique :

  1. Remplacer un PPI par un H2RA - c’est insuffisant. Le risque d’ulcère est 48 % plus élevé.
  2. Ne prescrire le PPI que pendant les premiers jours - le risque persiste tant que les deux médicaments sont pris.
  3. Penser que les AINS en vente libre sont sans danger - l’ibuprofène à 600 mg par jour, pris pendant 2 semaines, suffit à causer un ulcère.
  4. Ignorer les signes d’alerte : selles noires, vomissements avec sang, étourdissements, fatigue soudaine. Ce ne sont pas des « mauvais jours » - c’est un saignement.

Un gastro-entérologue sur Reddit a écrit : « Je vois chaque semaine des saignements évitables. Des patients prennent de l’ibuprofène depuis des mois pour leurs douleurs lombaires, puis on leur donne une cure de prednisone pour une bronchite. Rien de plus. Pas de PPI. Pas de mise en garde. »

Une bataille spirituelle entre un démon et un ange, un patient au centre, symbolisant le risque et la protection contre les saignements.

Les nouvelles solutions et les bonnes pratiques

En 2023, la FDA a approuvé un nouveau médicament : Vimovo, une combinaison de naproxène et d’ésoméprazole. Il réduit de 54 % les ulcères comparé au naproxène seul. C’est une avancée, mais il reste cher et n’est pas toujours remboursé.

Les meilleurs résultats viennent des systèmes de santé intégrés. À la Mayo Clinic, une alerte automatique dans le système informatique a été mise en place : dès qu’un médecin prescrit un AINS et un stéroïde, un PPI est automatiquement ajouté à la prescription. Résultat ? Une réduction de 68 % des saignements gastro-intestinaux en un an.

Des recherches génétiques commencent aussi à émerger. Certaines personnes ont des variantes génétiques qui les rendent plus sensibles aux dommages causés par les AINS et les stéroïdes. Dans le futur, un simple test génétique pourrait dire si vous êtes à risque élevé - mais ce n’est pas encore standard.

Que faire si vous prenez déjà ces deux médicaments ?

Si vous êtes en traitement par stéroïdes et AINS :

  • Ne vous arrêtez pas vous-même. Parlez à votre médecin.
  • Demandez explicitement : « Est-ce que je dois prendre un PPI ? »
  • Ne comptez pas sur les symptômes pour vous alerter - ils peuvent être absents.
  • Si vous avez plus de 65 ans ou un antécédent d’ulcère, insistez pour un PPI à dose complète.
  • Évitez les AINS en vente libre si vous prenez un stéroïde - même un simple ibuprofène de 200 mg par jour peut être dangereux.

Et si vous êtes médecin ? Prescrivez le PPI en même temps. Pas après. Pas « si nécessaire ». En même temps. C’est la seule façon d’éviter des saignements évitables.

Combien ça coûte ?

Les saignements gastro-intestinaux liés à cette interaction coûtent plus de 1,8 milliard de dollars par an aux États-Unis. En France, les coûts sont moins documentés, mais le phénomène est identique. Un saignement nécessite une hospitalisation, une endoscopie, une transfusion, parfois une chirurgie. Et souvent, la vie ne revient plus tout à fait comme avant.

La prophylaxie par PPI coûte moins de 2 euros par mois en générique. C’est un investissement minuscule pour éviter une catastrophe.

Les AINS en vente libre sont-ils sûrs si je prends un stéroïde ?

Non. Même les AINS en vente libre comme l’ibuprofène ou le kétoprofène augmentent le risque de saignement gastro-intestinal quand ils sont pris avec des stéroïdes. Une dose quotidienne de 200 à 400 mg pendant plusieurs jours peut suffire à provoquer un ulcère. Il n’existe pas de « dose sans risque » dans cette combinaison. La prophylaxie par PPI est nécessaire, peu importe la posologie ou le type d’AINS.

Puis-je remplacer le PPI par un H2RA comme la ranitidine ?

Non. Les H2RA sont moins efficaces que les PPI pour prévenir les ulcères causés par les AINS et les stéroïdes. Des études montrent que le risque d’ulcère est 48 % plus élevé avec un H2RA qu’avec un PPI. La ranitidine a aussi été retirée du marché dans plusieurs pays à cause de risques de contamination. Le PPI reste le seul traitement recommandé et validé pour cette indication.

Un stéroïde en cure courte (5 jours) est-il dangereux avec un AINS ?

Oui. Des études montrent que le risque de saignement augmente dès le 7e jour de combinaison. Même une courte cure de prednisone (5 à 10 jours) peut suffire à déclencher un ulcère saignant chez un patient sous AINS. Le risque n’est pas lié à la durée, mais à la combinaison. Il faut toujours prescrire un PPI en même temps, même pour une courte cure.

Les COX-2 comme le célécoxib sont-ils sans risque avec les stéroïdes ?

Non, mais leur risque est beaucoup plus faible. Le célécoxib réduit de 50 à 60 % le risque de saignement par rapport aux AINS traditionnels. Cependant, la combinaison avec des stéroïdes augmente encore ce risque - même si à un niveau moindre. Pour les patients à haut risque, le célécoxib avec PPI est la meilleure option, mais pas une garantie absolue. La prophylaxie par PPI reste recommandée même avec les COX-2.

Quels sont les signes d’un saignement gastro-intestinal ?

Les signes ne sont pas toujours évidents. Ils peuvent inclure : selles noires, goudronneuses et malodorantes ; vomissements avec du sang ou du matériel ressemblant à du marc de café ; étourdissements, essoufflement soudain, pouls rapide, pâleur, fatigue extrême. Parfois, il n’y a aucune douleur abdominale. Si vous prenez un stéroïde et un AINS, et que vous ressentez l’un de ces symptômes, consultez immédiatement un médecin. Ne attendez pas.

3 Commentaires
  • Gert-jan Dikkescheij
    Gert-jan Dikkescheij

    Je vois trop de patients qui prennent de l’ibuprofène tous les jours pour leur dos et qui se font prescrire de la prednisone pour une grippe. Personne ne leur dit rien. C’est une vraie bombe à retardement. Un PPI coûte moins de 2 euros par mois. Pourquoi on attend qu’il y ait un saignement avant d’agir ?

    Je suis médecin en Suisse et je prescris systématiquement le PPI en même temps. Pas de discussion. C’est une norme de soin, pas une option.

  • Deb McLachlin
    Deb McLachlin

    Je suis étonnée que les directives de l’American College of Gastroenterology soient si claires, et pourtant, dans la pratique, 78 % des patients à haut risque n’en bénéficient pas. C’est un échec systémique. Les médecins généralistes sont surchargés, les patients ne posent pas les bonnes questions, et les pharmacies ne font pas de rappel. Il faudrait une alerte automatisée dans les systèmes de prescription, comme à la Mayo Clinic. Ce n’est pas compliqué techniquement, c’est une question de volonté politique.

  • Margaux Bontek
    Margaux Bontek

    En France, on a tendance à sous-estimer les risques parce que les PPI sont bon marché et accessibles. Mais les patients les prennent de manière irrégulière, ou les arrêtent trop vite. Il faut les éduquer. Je travaille dans un centre de santé et je donne des fiches simples à mes patients : « Prends ce comprimé tous les jours, même si tu n’as pas mal. » C’est la clé. La prévention, ce n’est pas sexy, mais c’est ce qui sauve des vies.

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