Excès et déficience thyroïdiens causés par une mauvaise utilisation des médicaments

Excès et déficience thyroïdiens causés par une mauvaise utilisation des médicaments

Vous prenez de la levothyroxine pour votre thyroïde ? Vous n’êtes pas seul. Mais ce que beaucoup ne savent pas, c’est que ce médicament, quand il est mal utilisé, peut vous rendre malade - voire mettre votre vie en danger. Ce n’est pas une question de surdose accidentelle. C’est souvent une décision consciente : pour perdre du poids, pour avoir plus d’énergie, pour performer mieux au sport. Et ça, c’est une bombe à retardement.

Quand le traitement devient une drogue

La levothyroxine est un médicament standard, prescrit à des millions de personnes dans le monde. Aux États-Unis, plus de 120 millions d’ordonnances ont été délivrées en 2023. Elle remplace l’hormone que la thyroïde ne produit plus. Simple, efficace, quand elle est bien utilisée. Mais quand elle est prise en excès, elle devient un poison. Ce qu’on appelle l’hyperthyroïdie factice : une surproduction d’hormones, pas due à une maladie de la thyroïde, mais à une ingestion volontaire de comprimés.

Les symptômes ? Ils arrivent vite. Perte de poids rapide, transpiration excessive, tremblements des mains, palpitations, insomnie, nervosité. Certains patients déclarent une perte de cheveux, une sensation de chaleur constante, des nausées. Dans les cas graves, le rythme cardiaque dépasse 140 battements par minute, la pression monte, et la poitrine se serre. Une étude a montré que 92 % des personnes qui abusent de la levothyroxine perdent du poids, et 78 % ont des tremblements visibles. Ce n’est pas un effet secondaire : c’est un effet recherché. Et c’est dangereux.

Les risques invisibles

Ce qui inquiète les médecins, ce n’est pas seulement l’effet immédiat. C’est ce qui se passe à long terme. Une hyperthyroïdie chronique due à la levothyroxine augmente le risque d’ostéoporose de 3,2 fois. La densité osseuse diminue de 2 à 4 % chaque année. Pour une femme de 35 ans qui pense qu’elle perd du poids sans effort, ce n’est pas un succès : c’est une perte de masse osseuse qu’elle ne verra pas avant d’avoir une fracture.

Et puis il y a le cœur. Les cas d’arythmie, de tachycardie, de douleur thoracique sont fréquents chez les abusants. Un cas rapporté en 2009 montre une personne qui a développé une choréoathétose - des mouvements involontaires des bras et des jambes - à cause d’une surdose. Disparu en une semaine après l’arrêt du médicament. Mais tout le monde n’a pas cette chance. Les urgences hospitalières voient de plus en plus de patients avec des fréquences cardiaques supérieures à 130 bpm, des températures corporelles dépassant 40 °C, des crises de panique. Certains sont arrivés en réanimation. Un patient sur Reddit a écrit : « J’ai pris 200 mcg par jour pendant trois mois. J’ai fini aux urgences avec un rythme cardiaque de 142. Les médecins ont dit que j’étais chanceux d’être vivant. »

Qui est concerné ?

Ce n’est pas seulement les personnes atteintes de troubles de l’alimentation. Ce sont aussi des sportifs, des personnes en surpoids, des jeunes qui cherchent à « optimiser » leur corps. Une étude a révélé que 8,7 % des personnes qui vont régulièrement à la salle de sport avouent avoir pris de la levothyroxine sans ordonnance. 68 % de ces patients sont des femmes, avec un âge moyen de 34,7 ans. Elles pensent que c’est une solution facile. Elles ne savent pas que leur thyroïde, une fois déréglée, peut ne jamais revenir à son état normal.

Et ce n’est pas seulement la levothyroxine. D’autres médicaments peuvent aussi perturber la thyroïde. L’amiodarone, un traitement contre les troubles du rythme cardiaque, contient 37,3 % d’iode. Il peut provoquer à la fois une hyperthyroïdie et une hypothyroïdie. Les produits de contraste iodés utilisés en radiologie peuvent déclencher une hyperthyroïdie deux à douze semaines après l’injection. Les traitements immunothérapeutiques pour le cancer - comme les inhibiteurs de point de contrôle - provoquent une dysfonction thyroïdienne chez jusqu’à 8 % des patients. Ces cas sont souvent sous-estimés, parce que les patients sont déjà malades. Mais ils doivent être surveillés chaque 4 à 6 semaines.

Femme regardant son reflet déformé en squelette avec une glande thyroïde radioactive, dans une salle de sport.

Comment reconnaître une hypothyroïdie causée par un médicament ?

On pense souvent que la thyroïde ne peut être que trop active. Mais elle peut aussi devenir trop lente - et ce n’est pas toujours à cause d’une maladie auto-immune comme Hashimoto. Certains médicaments, comme le lithium (prescrit pour les troubles bipolaires), provoquent une hypothyroïdie chez 15 à 20 % des utilisateurs à long terme. Les symptômes sont les mêmes que pour une hypothyroïdie naturelle : fatigue extrême (89 % des cas), intolérance au froid (76 %), prise de poids (68 %), dépression (55 %), peau sèche (47 %).

La différence ? Si vous arrêtez le lithium, la thyroïde se rétablit souvent en 3 à 6 mois. Avec Hashimoto, c’est pour la vie. Mais beaucoup de patients ne comprennent pas que leur fatigue vient du médicament, pas de leur « paresse ». Ils augmentent leur dose de levothyroxine… et s’enfoncent encore plus dans le déséquilibre.

Le piège du « j’ai oublié ma dose »

Un autre piège courant ? Les patients qui prennent leur médicament de manière irrégulière. Certains sautent des doses parce qu’ils se sentent bien. D’autres en prennent une en plus avant leur consultation, pour que leur taux d’hormones semble normal. C’est une erreur. Le TSH - l’hormone qui contrôle la thyroïde - met 6 semaines à réagir à un changement de dose. Si vous prenez une dose supplémentaire juste avant votre rendez-vous, votre T4 sera élevé, mais votre TSH ne sera pas encore normalisé. Résultat ? Le médecin pense que vous avez besoin de plus de médicament… et vous pousse encore plus vers la surdose.

Une étude montre que 15 à 20 % des patients non conformes sont mal diagnostiqués à cause de ce « retard » du TSH. C’est un piège clinique majeur. Et il est facile à éviter : il suffit de dire la vérité. « J’ai sauté des doses. » « J’ai pris un comprimé en plus. » « J’ai pris des compléments sans dire à mon médecin. »

Les interactions cachées

La levothyroxine ne se prend pas n’importe comment. Elle doit être prise à jeun, au moins 30 à 60 minutes avant le petit-déjeuner. Et surtout, elle ne doit pas être prise avec du calcium, du fer, ou des antacides. Ces substances réduisent son absorption de 35 à 50 %. Beaucoup de patients prennent un complément de calcium le matin… et ne comprennent pas pourquoi leur traitement ne fonctionne pas. Leur taux d’hormones reste bas. Le médecin augmente la dose. Et le cercle vicieux continue.

Le même problème existe avec le café. Une tasse de café prise juste après la levothyroxine peut réduire son efficacité. Pas besoin d’être parfait. Mais il faut être cohérent. Prendre le médicament à la même heure, avec les mêmes règles, tous les jours.

Médecin et patient dans un cabinet, un comprimé numérique émettant un hologramme de leur thyroïde et de leur fréquence cardiaque.

Les solutions existent

Heureusement, il y a des solutions. Le premier pas, c’est la reconnaissance. Admettre qu’on a abusé du médicament. Le deuxième, c’est l’arrêt progressif, sous surveillance médicale. Pour les cas légers, 87 % des patients retrouvent un équilibre naturel après 2 à 3 semaines d’arrêt. Pour les cas plus graves, un suivi cardiaque est indispensable.

Les médecins recommandent désormais des tests de thyroïde tous les 6 à 8 semaines quand on débute un traitement. Et ce n’est pas une formalité : c’est une nécessité. Une étude montre que les patients qui reçoivent un accompagnement complet sur la prise du médicament ont 63 % moins de risques de ne pas respecter leur traitement.

Et puis il y a la technologie. En juin 2023, la FDA a approuvé la première version numérique de la levothyroxine : un comprimé avec un capteur ingérable qui envoie un signal à un téléphone quand il est avalé. Les premiers résultats montrent une réduction de 52 % des erreurs de dosage. Ce n’est pas une solution miracle, mais c’est un outil puissant pour ceux qui veulent vraiment se soigner.

Les compléments en ligne : un danger sous-estimé

Il y a aussi ce que vous ne voyez pas : les suppléments vendus en ligne. Des sites proposent des « boosters thyroïdiens », des « brûleurs de graisse naturels » contenant de la thyroxine ou de la triiodothyronine. L’FDA a identifié 217 sites en 2022 qui vendaient ces produits sans ordonnance - une hausse de 43 % depuis 2020. Ces produits n’ont aucune régulation. Une gélule peut contenir 10 mcg ou 100 mcg. Vous ne le savez jamais. Et vous ne savez pas non plus ce qu’il y a d’autre dedans. Des métaux lourds ? Des substances interdites ? C’est un jeu de roulette russe.

Comment sortir de ce cercle ?

Si vous pensez que vous avez abusé de la levothyroxine : arrêtez de prendre des comprimés supplémentaires. Ne les cachez plus. Parlez à votre médecin. Dites-lui tout. Même si vous avez peur. Même si vous pensez qu’il va vous juger. La plupart des médecins ne jugent pas. Ils veulent vous aider.

Si vous êtes diagnostiqué(e) avec une hypothyroïdie et que vous ne vous sentez pas mieux : demandez à vérifier votre taux de TSH et de T4. Vérifiez si vous prenez vos comprimés à jeun. Vérifiez si vous prenez des compléments en même temps. Vérifiez si vous avez pris un produit de contraste récemment. Vérifiez si vous êtes sous traitement pour un cancer. Chaque élément compte.

La thyroïde n’est pas un bouton à régler pour perdre du poids. C’est un organe central, qui régule votre métabolisme, votre cœur, votre cerveau, vos os. Quand vous la manipulez sans contrôle, vous jouez avec votre santé. Et ce n’est pas une question de volonté. C’est une question de compréhension.

La bonne nouvelle ? Avec un suivi correct, une bonne communication avec votre médecin, et une prise de conscience, la majorité des déséquilibres causés par les médicaments peuvent être corrigés. Sans séquelles. Sans douleur. Sans danger. Il suffit de ne pas attendre qu’il soit trop tard.

1 Commentaires
  • Dominique Hodgson
    Dominique Hodgson

    Les mecs qui prennent de la levothyroxine pour perdre du poids c’est juste de la folie pure
    Je vois ça tous les jours dans les salles de sport
    Personne ne contrôle rien et ils se croient intelligents
    Et puis ils se réveillent avec un rythme cardiaque de 150 et ils appellent les urgences
    Et là ils disent ‘mais j’ai juste pris un peu pour brûler les graisses’
    Non mec t’es pas un biohacker t’es un con qui joue à la roulette russe avec ton cœur

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